Dans sa quête de croissance économique, le Cameroun a ciblé un certain nombre de secteurs considérés comme des vecteurs potentiels de croissance, dont le secteur minier. Le terme “exploitation minière” fait référence aux substances du sous-sol et du sol, qui relèvent respectivement du régime juridique des mines et des carrières, dont font partie les minéraux de développement. Dans ses articles 64 à 91, le Code minier du 14 décembre 2016 fournit des informations sur la richesse du Cameroun en minerais de développement. Il s’agit, à l’article 64 (1), du sable, du sable siliceux, du gravier, des tourbières, de la pouzzolane, de l’argile, des latérites, de la calcite, de la dolomie, du talc, du mica, du graphite, du kaolin, de la pyrophillite et de l’onyx, entre autres, disséminés sur l’ensemble du territoire national.
Les minéraux de développement, ou minéraux négligés, sont clairement réglementés par le code minier. Selon les articles 68, 69 et 70, leur exploitation est soumise à une autorisation préalable, qui ne peut excéder deux ans, délivrée par l’administration chargée des mines, et au paiement des différentes redevances (droits fixes, redevance superficiaire, taxe d’extraction) dues au titre de l’activité. Pour commencer l’exploitation d’une carrière de sable, une personne physique ou morale de droit camerounais doit d’abord obtenir une autorisation dont la demande doit être accompagnée du paiement d’un droit fixe de 1,5 million de FCFA, conformément à l’article 171. Une fois l’autorisation obtenue par l’exploitant potentiel de la carrière de sable, ce dernier est désormais soumis au paiement de la redevance superficiaire, fixée à 10 FCFA/m2/an, comme le stipule l’article 173 (1) du Code minier. Une fois l’exploitation commencée, le titulaire de l’autorisation est tenu de payer une taxe mensuelle d’extraction des produits de carrière de 200 francs CFA/m3, conformément à l’article 175 du code minier. En outre, cette activité est soumise à la surveillance et au contrôle du ministère des mines, d’autres administrations compétentes ou de tout organisme dûment mandaté, comme le stipule l’article 196 du code minier.
Malheureusement, dans la pratique, et dans le cas particulier de la localité d’Ebebda, les exploitants de carrières de sable visités ne disposent d’aucune autorisation d’exploitation. Ce sont les propriétaires fonciers qui, en vertu du droit écrit ou du droit coutumier, fixent les conditions d’accès à une carrière de sable située sur leur propriété. En effet, l’imagerie populaire considère le sable comme une ressource appartenant au propriétaire foncier, dont la gestion est laissée à sa seule discrétion, et qui n’est donc pas soumise à l’impôt. Par conséquent, aucune des redevances imposables sur l’activité n’est perçue. La supervision administrative est également inexistante.
En effet, lors de l’ouverture d’une carrière de sable, le propriétaire désigne un contremaître qui est chargé de percevoir auprès des transporteurs, et pour son compte, une somme variant entre 3 000 et 7 000 FCFA par voyage. Le chargement d’un camion de sable dans une carrière est effectué par un groupe de dix à douze chargeurs, qui reçoivent une rémunération comprise entre 22 000 et 25 000 FCFA à la fin du travail, soit 2 000 à 2 500 FCFA par chargeur. En ce qui concerne la commercialisation, force est de constater que le prix de vente diffère selon qu’il s’agit de sable fin ou de sable de Sanaga. Par exemple, alors que les camionneurs paient un maximum de 25 000 FCFA, un camion de sable fin ou de sable de Sanaga provenant d’une carrière se vend entre 150 000 et 180 000 FCFA. Il est clair que les transporteurs qui achètent le sable aux carrières sont les principaux bénéficiaires de cette activité. Même si les employés des carrières semblent satisfaits de ce qu’ils reçoivent à la fin de chaque chargement, ils pourraient gagner davantage avec un minimum d’organisation dans le secteur.
En outre, l’article 3 de la loi n° 2004/018 du 22 juillet 2004 fixant les règles applicables aux communes a confié à la commune une mission générale de développement local et d’amélioration du cadre et des conditions de vie de ses habitants. Ce transfert de compétences s’accompagne des ressources financières nécessaires. C’est ce qui a justifié l’adoption de la loi n° 2009/019 du 15 décembre 2009 relative à la fiscalité locale au Cameroun. En conséquence, le conseil municipal a désormais le pouvoir de définir son assiette fiscale, par le biais de droits et de taxes appelés“taxes communales” en vertu de l’article 61. Il s’agit notamment de la taxe sur le transport des produits de carrières, qui s’applique aux véhicules transportant les produits de l’exploitation concernée, selon l’article 108. Selon l’article 110 de la loi du 15 décembre 2009, cette taxe est perçue par la recette municipale contre délivrance d’un reçu tiré d’un carnet à souches sécurisé et portant une valeur faciale indiquant le tarif voté par le conseil municipal. Conformément à l’article 109 de la loi de 2009, chaque camion de sable quittant Ebebda paie à la commune la somme de 3 000 FCFA/tour, applicable aux véhicules de plus de dix tonnes. La taxe sur le transport des produits de carrière est donc la seule taxe perçue auprès des exploitations de carrières de sable à Ebebda.
En fin de compte, la nature quasi-informelle de l’exploitation des carrières de sable à Ebebda et dans d’autres localités prive les communes et les communautés locales de ressources financières importantes qui pourraient contribuer au bien-être de la population locale. En effet, outre le Trésor Public, le Ministère des Mines, des Domaines et des Finances, et le Fonds prévu par le Code Minier, les Communes et la population locale figurent parmi les bénéficiaires des redevances superficiaires et de la taxe d’extraction. C’est pourquoi nous demandons aux services gouvernementaux d’examiner de plus près l’exploitation des minéraux de développement, comme c’est le cas pour les mines. Car ces minerais, qui sont négligés, pourraient constituer des niches financières importantes qui permettraient à l’État, au niveau global, et aux CTD, au niveau local, de répondre efficacement aux besoins de développement socio-économique de la population.
Par Guy Lebrun AMBOMO, assistant de programme et Christian ANANGUE, assistant de programme IE