Greniers communautaires: outil de cohésion familiale

La région de l’Extrême-Nord est celle qui enregistre le taux le plus élevé de personnes en insécurité alimentaire au Cameroun en dehors des zones en crise (Nord-ouest, Sud-ouest). En effet, l’agriculture et l’élevage occupent 70 % de la population. Les agriculteurs pratiquent essentiellement une agriculture de subsistance et la production en céréales de la région est suffisante pour répondre aux besoins de base de la population pendant huit mois dans l’année. Cette population se nourrit essentiellement de céréales en l’occurrence le mil, le sorgho et le maïs.  Ainsi, la population connait une pénurie de nourriture qui dure généralement de juillet à septembre. Au cours de cette période, les populations de cette région peinent à se nourrir et sont contraintes de vendre une partie de leur bétail pour subvenir à leurs besoins. Un rapport d’OCHA intitulé Cameroun : Rapport de situation, publié en Juin 2023, relève qu’il serait probable, que 3 millions de personnes soient touchées par l’insécurité alimentaire au Cameroun en 2023. Ce rapport ajoutait qu’au moins 126 700 personnes souffriraient de malnutrition aiguë (C’est le degré le plus grave de la malnutrition car le corps commence à consommer ses propres tissus pour y trouver de l’énergie et des composants nutritionnels nécessaires à sa survie, faisant alors fondre les muscles) globale dans la région de l’Extrême Nord en 2023. Ce chiffre intègre des femmes enceintes et allaitantes (3 700) ainsi que des filles et des garçons (123 000). L’insécurité alimentaire continue d’avoir des incidences dans la vie des populations de cette Région, tant au niveau sanitaire que sécuritaire et physique.  Cette situation est liée à plusieurs facteurs tels que les chocs climatiques (les catastrophes naturelles, la sècheresse, les inondations), l’impraticabilité des routes, la pauvreté, la spéculation sans oublier le climat sécuritaire extrêmement volatile. L’une des conséquences marquantes de l’insécurité alimentaire dans la Région de l’Extrême-Nord reste la fragilisation des liens familiaux.

La fragilisation des liens familiaux à cause de l’insécurité alimentaire

La période de soudure dans la région de l’Extrême-Nord est la période de l’année qui est marquée par un taux d’insécurité alimentaire élevé. Les populations pour se nourrir et subvenir à leurs besoins, sont contraintes d’employer certaines mesures qui tendent à affaiblir les relations entre les membres de la famille. On note le problème de l’exode rural de personnes de diverses tranches âges pendant cette période. En effet, les jeunes quittent les villages pour la ville à la recherche de meilleures conditions de vie. C’est le cas dans les départements du Diamaré et du Mayo Tsanaga. Par ailleurs, certaines femmes font du petit commerce dans les marchés locaux, elles achètent du bois qu’elles déposent au bord de la route pour vendre afin d’acheter du mil pour survivre en période de soudure. D’autres femmes passent la journée à travailler dans les plantations des personnes fortunées du village contre une tasse de mil qu’elles rentrent préparer le soir pour nourrir leurs familles ; alors qu’à ce même moment dans son champ, il se forme de petites broussailles du fait de l’absence d’entretien.  Les hommes quant à eux sont contraints de quitter le village pour aller en ville afin de mener des activités telles que le transport à moto trivialement appelé « moto taxi », leur permettant de gagner un peu d’argent pour prendre soin de leur famille. Ceux-ci abandonnent dès lors femmes et enfants. Les enfants quant à eux abandonnent l’école certains jours afin de mener des activités pouvant leur rapporter de l’argent pour acheter de quoi manger. De ce fait, les parents n’ont plus le contrôle sur les enfants, on assiste à une perte de l’autorité parentale. Ce qui entraîne des échecs sur le plan de l’éducation. Au regard de cette réalité, RELUFA a mis sur pied un programme pour contribuer à apporter des solutions à l’insécurité alimentaire et ses effets sociaux.

Solution apportée par RELUFA

En réponse à cette situation, RELUFA a mis sur pied le projet de lutte contre l’insécurité alimentaire des communautés locales par la production agricole et les banques de céréales. Il vise à rendre disponible les céréales et améliorer la production agricole des communautés locales de la région de l’Extrême-Nord. Le projet a été initié dans 2 départements à savoir le Mayo Tsanaga et le Diamaré et dans les 4 arrondissements de Mokolo, Meri, Gazawa et Ndoukoula. Le projet a permis de mettre sur pied des greniers communautaires dans environ 45 villages de la région. On compte aujourd’hui près de 25 000 bénéficiaires. L’initiative est salutaire à plusieurs titres car pour les uns, ils n’ont plus besoin de commercialiser leur production de mil à bas prix dès la récolte pour scolariser les enfants ou subvenir à leurs besoins. Pour d’autres ils n’ont plus besoin de vendre le bétail afin d’acheter du mil pour la consommation des ménages. Par ailleurs les revenus tirés de la vente du bétail sont désormais utilisés pour scolariser les enfants et assurer les soins de santé de la famille. Avec la disponibilité du mil dans le village grâce aux greniers communautaires, les parents restent sur place pour cultiver leurs propres champs et les enfants peuvent aller à l’école normalement, ce qui conduit à une réduction de l’exode rural dans les villages ayant reçu l’appui du RELUFA.  

Les actions du RELUFA ont permis de renforcer la cohésion sociale au sein des familles car les céréales sont disponibles en toute saison. Par conséquent, les hommes et les enfants renforcent la main d’œuvre agricole ce qui permet un meilleur rendement agricole et la réduction du problème de soudure. Fort de ce qui précède, il est important de soutenir les actions de RELUFA afin d’accroître l’impact du projet dans d’autres villages de la Région pour ainsi atténuer les effets néfastes liés à l’insécurité alimentaire dans cette partie du pays.  

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