Par Joséphine Maïdjane Mbara
Mercredi le 27 avril 2022, le RELUFA a tenu à l’hôtel Tou’Ngou-Yaoundé l’atelier de restitution des articles et reportages des Journalistes relatifs à la gouvernance foncière et des autres ressources naturelles au Cameroun. Il s’agit d’une activité du projet LandCam cofinancé par l’Union Européenne et mis en œuvre par un collège d’organisations non gouvernementales à savoir : le Centre pour l’Environnement et le Développement (CED), le Réseau de Lutte contre la Faim (RELUFA) et l’Institut International pour l’Environnement et le Développement (IIED).
Pourquoi les journalistes ?
Dans le cadre de ce projet, le RELUFA a mis un point d’honneur sur l’implication des journalistes pour l’amélioration de la gouvernance foncière et des ressources naturelles. Le constat a été fait qu’un certain nombre d’acteurs, notamment les journalistes n’étaient pas toujours assez outillés sur les réels enjeux autour de la gouvernance foncière. De ce fait, le projet LandCam a consisté à informer et à former les médias sur le régime foncier camerounais et les défis existants. Ainsi, des journalistes ont reçu de multiples appuis pour la réalisation d’enquêtes sur le terrain afin d’approfondir leur compréhension sur des sujets liés à la gouvernance foncière. En plus, il a été remarqué que leurs travaux d’investigation rendent mieux compte des difficultés liées à l’accès et à son usage par les populations, et ils servent aussi de plaidoyers auprès des autorités étatiques.
Les thématiques soulevées par les journalistes en compétition
L’atelier de restitution visait deux (02) objectifs : offrir aux journalistes sélectionnés un cadre adéquat pour rendre compte des découvertes et des constats sur le terrain à leurs pairs, à des représentants de l’administration publique (MINDCAF, MINADER, MINEPIA, MINAT) et des organisations de la société civile (OSC) ; et décerner des prix à trois (03) journalistes dont les articles ou reportages auraient obtenu de meilleurs scores à l’issu des votes par les jurys constitués. Ce sont au total sept (07) articles et reportages qui étaient en compétition avec des problématiques aussi importantes les unes que les autres.
Les journalistes ont abordé des faits aussi différents les uns des autres, tous en rapport avec le foncier. Ainsi, le sujet relatif à l’accaparement des terres par les agro-industries ou pour des projets de développement a été traité. Dans ce sillage, Boris Ngounou a produit un reportage sur la carrière de Tchipou, Arrondissement de Bafoussam III (Région de l’Ouest – Cameroun). Il s’agit d’une localité où une entreprise chinoise extrait du gravier sur une superficie de douze (12) hectares. Malheureusement les activités de dynamitage dans cette carrière entrainent des conséquences désastreuses comme la destruction des cultures (ce qui diminue les rendements agricoles), et la vibration des sols qui débouche sur la rareté de l’eau dans les nappes phréatiques. Par ailleurs, dans le cadre du projet de construction du barrage de Nachtigal, le journaliste Gibrile Kenfack Tsabdo a dénoncé les pratiques de l’entreprise NHPC qui outrepasse les limites de terrain qui lui sont attribuées pour empiéter sur celles qui reviennent aux populations. Il a aussi relevé la concession de vastes terres à l’entreprise SAFACAM dans la Sanaga-Maritime (Région du Littoral) pour la plantation de noix de palme. A cause de l’implantation de SAFACAM, de nombreux jeunes et des femmes ont perdu des espaces cultivables. Or, il est reconnu que les activités agricoles reposent majoritairement sur ces groupes. C’est un sujet qui a également été abordé par le journaliste Charles Tembei lequel a réalisé un reportage radio dont le titre est : « Access to land for young men and women ». Il a mené ses investigations dans les Département du Noun (Ouest-Cameroun) et de la Mezam (Nord-Ouest du Cameroun). Il démontre par exemple que la difficulté pour les jeunes et les femmes d’avoir accès aux terres impacte sérieusement la production, le rendement agricole et leur autonomisation.
Par ailleurs, la problématique de l’expropriation et de l’indemnisation a été évoquée par le journaliste Lazare Kingue. Ainsi, son investigation a permis de réaliser que vingt-trois (23) années se sont écoulées sans que les populations impactées par le projet de construction d’un aéroport dans la localité de Kribi ne reçoivent d’indemnisation. Il a aussi relevé que le site n’a jamais été mis en valeur par le Gouvernement, et les communautés expropriées ne peuvent pas utiliser ces terres qui sont pourtant abandonnées. D’autres journalistes se sont penchés sur les conflits fonciers. C’est le cas de Hervé Ndombong qui s’est intéressé à un conflit foncier opposant le peuple autochtone Baka à ses voisins Bantous dans le village Missoumè, ce qui a empêché la création d’une institution traditionnelle. Fait marquant, à cause des projets dits de développement, les Bakas qui se trouvent actuellement à Missoumè se sont sédentarisés. Or, ils sont reconnus pour être des peuples semi-nomades. Cette sédentarisation a abouti à ce que les Bakas revendiquent le droit de propriété sur les terres avec leurs voisins Bantous. Dans la même lancée, l’article du journaliste Maxcel FOKWEN a également mis en lumière un litige foncier liée à la vente incontrôlée des terres. Cette situation favorise l’aggravation des conflits entre populations autochtones et nomades dans les Départements de la Meme et du Fako (Région du Sud-Ouest). Un problème qui semble se poser dans plusieurs autres localités, étant donné que le journaliste Jean-Charles BIYO’O ELA s’est penché sur un conflit agro-pastoral dans le département de la Haute-Sanaga, précisément à Mbandjock, Nkoteng et Lembe-Yezum. En effet, les plantations de SOSUCAM qui occupent 20.000 ha de superficie (sur les 24.000 ha qui lui sont concédées) accentue la rareté des espaces cultivables pour la population et exacerbe les conflit agro-pastoraux.
En conclusion….
En somme, le but final de tous les journalistes au regard des articles et reportages sélectionnés étaient de contribuer à l’amélioration de la gouvernance foncière au Cameroun, à l’effet de garantir les droits fonciers de tous les citoyens.